Hommes des tourbières

L'expression «hommes des tourbières» sert à désigner des restes humains momifiés mis au jour dans les tourbières du Nord de l'Europe.



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L'homme de Grauballe au musée de Mœsgaard (Danemark).

L'expression «hommes des tourbières» sert à désigner des restes humains momifiés mis au jour dans les tourbières du Nord de l'Europe (Scandinavie, îles Britanniques surtout). À la différence de la majorité des cadavres aussi anciens, par suite de conditions spécifiques de conservation, les cadavres des tourbières présentent des échantillons de peau et d'organes internes particulièrement bien conservés : sous certaines conditions, l'acidité de l'eau, le froid et l'absence d'oxygène concourent pour dessécher et tanner naturellement la peau des cadavres ; le squelette, par contre, est rarement intact, car l'acidité de la tourbe dissout le phosphate de calcium[1] qui forme l'armature des os.

Les hommes des tourbières forment des vestiges d'un particulièrement grand intérêt pour l'archéologie. Certains détails anatomiques ou morphologiques ont été préservés sur ces corps, comme les tatouages ou les empreintes digitales. Le médecin légiste danois C. H. Vogelius Andersen fut même surpris de constater que les empreintes digitales de l'homme de Grauballe étaient plus nettes que les siennes[2]. La barbe et les traits de l'homme de Tollund sont aussi spécifiquement bien préservés.

Données chronologiques

Plus d'un millier de corps ont été extraits de tourbières associées à la culture celtique de l'Âge du Fer[3], quoique la plus vieille momie des tourbières, la femme de Kœlbjerg, ait été datée de 3500 av. J. -C. La momie la plus récente est celle d'une irlandaise du XVIe siècle qui a dû être ensevelie en terre non consacrée parce qu'elle s'était suicidée. Les plus anciens cadavres celtes remontent au IVe siècle av. J. -C.

Des restes momifiés d'hommes et d'animaux ont été retrouvés dans des tourbières en Grande-Bretagne, en Irlande, en Allemagne du Nord, aux Pays-Bas (Drenthe, Zélande), au Danemark (Jutland) et en Suède méridionale. Les premières mentions de trouvailles de ce genre remontent au XVIIIe siècle (momie de Kibbelgaarn aux Pays-Bas, en 1791). Il est impossible de dire d'emblée, quand on découvre un tel cadavre, s'il a été enseveli il y a une décennie, un siècle ou quelques millénaires : ce sont les progrès accomplis par la médecine légale au cours du XXe siècle (surtout la radiodatation, les CT-scans, les images en 3D) qui ont permis d'en savoir davantage sur l'époque où vivaient ces hommes, sur l'âge au moment du décès, etc. Les biologistes ont pu étudier les fragments de peau, reconstituer les traits du visage ou déterminer les derniers aliments absorbés avant la mort en analysant le contenu de l'estomac[4]. La denture permet aussi de déterminer l'âge approximatif du mort et son régime alimentaire.

Causes du décès

Énormément d'hommes des tourbières semblent avoir été exécutés, de façons d'ailleurs fort différentes : poignardés, égorgés, matraqués ou pendus. Les seins de l'homme d'Old Croghan, par exemple, ont été tranchés. Les cadavres ont quelquefois été décapités, puis jetés de propos délibéré dans la tourbière, et enfoncés sous la vase avec une perche, de fascines de saule ou de baguettes de noisetier.

Pour les Germains, comme pour bien d'autres peuples de l'Antiquité, les marécages et les miasmes marquaient des passages entre le monde des vivants et le monde des morts. Aussi y pratiquaient-ils fréquemment leurs sacrifices rituels, marquant par là que la victime était vouée aux divinités infernales. L'écrivain latin Tacite rapporte aussi qu'ils exécutaient les lâches, les fuyards et ceux qui manquaient d'ardeur au combat en les précipitant dans un marécage : «Proditores et transfugas arboribus suspendunt, ignavos et imbelles et corpore infames cæno ac palude, injecta insuper crate, mergunt[5].. » («Ils pendent les traîtres et les fuyards aux arbres, et noient les lâches, les infirmes et ceux qui refusent de se battre dans la fange et les marais, en les couvrant de branchages.»)

Les résultats des expertises médico-légales ne permettent toujours pas de discriminer s'il s'agissait d'exécutions rituelles consécutives à un crime commis par la victime, ou de sacrifices religieux. Certains cadavres, comme celui de l'homme de Tollund (Danemark) ou l'homme de Lindow (Angleterre), ont été retrouvés avec la corde qui a servi à les étrangler. D'autres, comme la fille d'Yde aux Pays-Bas et les momies d'Irlande, avaient les cheveux coupés particulièrement courts sur une partie du crâne. Les hommes des tourbières appartenaient surtout à la classe aisée : leurs ongles sont manucurés et les tests effectués sur les protéines cutanées reflètent une alimentation abondante. Nous savons par le géographe Strabon que les Celtes pratiquaient la divination sur les entrailles des hommes sacrifiés : en effet, on relève sur certains corps (par exemple l'un des hommes de Weerdinge retrouvés aux Pays-Bas dans la province méridionale de Drenthe), que les entrailles ont été extraites en partie par des incisions.

Cependant, comme le suggère un récent article du National Geographic, il est envisageable que ces blessures n'aient pas forcément été infligées par d'autres hommes, mais résultent simplement de la pression exercée par la tourbe : cela expliquerait les nombreux cas où les os semblent avoir été écrasés.

Quoi qu'il en soit, la collecte d'aussi nombreux exemples de meurtres rituels à travers une si grande partie de l'Europe du Nord reflète une culture assez homogène, qui se superpose aux indices matériels des sites archéologiques de la civilisation de La Tène.

Conséquences pour l'archéologie

Dans le cas des «momies» de Cladh Hallan, les immersions dans la tourbe ont pu être interprétées comme une technique primitive d'embaumement pour les nobles.

Aujourd'hui, les rayons X sont une étape préliminaire importante pour l'examen des hommes des tourbières, car ils permettent de dessiner la forme de la momie intacte au sein de la gangue de tourbe. On peut alors dégager le corps sans risque de l'endommager par un creusement hâtif. La datation par le carbone 14 est particulièrement souvent utilisée, car elle sert à situer chronologiquement la période d'enfouissement, du moins jusqu'à la fin du Paléolithique. Pour ce qui est des causes du décès, dans un nombre étonnant de cas, on constate qu'il s'agit d'une mort violente ou alors d'une exécution. L'homme de Tollund, par exemple, avait un lacet serré autour du cou et l'homme de Windeby I a été repoussé au milieu du marécage avec une perche.

Comme la tourbe préserve les tissus mous, le contenu de l'estomac peut presque toujours être analysé. On peut ainsi connaître exactement le régime alimentaire de ces populations. La reconstruction faciale donne aussi des résultats impressionnants ; conçue à l'origine pour identifier les victimes de crimes contemporains, cette technique sert à reconstituer les traits du visage à partir de la forme du crâne et de l'âge de la victime au moment du décès. Ainsi, Richard Neave de l'université de Manchester a pu reconstituer en 1993 le visage de la fille d'Yde, à partir de tomographies du crâne. Cette momie et sa reconstruction faciale sont exposées au musée de Drenthe à Assen. On a pu aussi reconstituer le visage de l'homme de Lindow (British Museum à Londres), et de Windeby I (Archäologisches Landesmuseum, Schleswig, Allemagne).

Momies célèbres

Les dates indiquées ont été obtenues par datation par le carbone 14.

Notes et références

  1. Cf. l'article «Os» et Bog body.
  2. C. H. Vogelius Andersen, Forhistoriske Fingeraftryk, Kuml, 1956, pp. 151-154.
  3. John Coles, «An assembly of Death... », p. 219.
  4. John Coles, op. cit., pp. 221-223.
  5. Tacite, Germania, XII, 1.

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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